L'arrache-coeur de VIAN

Je dirais pour commencer que Vian ça ne se résume pas !!!!

Il faut le lire pour le comprendre, car ça ne vous avancerez à rien de savoir qu’ici les enfants volent, les vieux sont vendus dans des foires, les chats parlent et les bateaux marchent… Bref, c’est l’univers de Vian celui qu’on aime et qu’on a toujours grand plaisir à découvrir.

Je peux tout de même vous glisser que le thème central du roman traite des relations mère-enfants : Clémentine femme d’Angel (ceux qui ont lu « Un automne à Pékin » le reconnaîtront) accouche de triplets qu’elle nomme Joël, Noël et Citroën. Parallèlement, Jacquemort le narrateur principal, cherche à réaliser une psychanalyse intégrale et décide de passer quelques temps chez Clémentine et Angel…
En ce qui concerne les relations mère-enfants elles sont ici possessives, angoissantes et exigeantes. Vian dénonce ces mères étouffant leurs enfants sous trop amour.

« Mais ça meurt, en cage, les oiseaux, dit Jacquemort. - Ca vit très bien, dit Clémentine. C’est même le seul endroit où on puisse les soigner convenablement. »

« Les enfants appartiennent à leur mère. Puisqu’elles ont eu mal en les faisant, les enfants appartiennent à leur mère. Et pas à leur père. Et leurs mères les aiment, par conséquent, il faut qu’ils fassent ce qu’elles disent. Elles savent mieux qu’eux ce qu’il leur faut, ce qui est bon pour eux, ce qu’il fera, qu’il resteront des enfants le plus longtemps possible.[…]On devrait faire la même chose avec les enfants entiers. Les empêcher de grandir. Ils sont bien mieux à cet âge-là. Ils n’ont pas de soucis. Ils n’ont pas de besoins. Ils n’ont pas de mauvais désirs. Plus tard, ils vont pousser. Ils vont étendre leur domaine. Ils vont vouloir aller plus loin. Et que de risques nouveaux. »

Le Village est aussi une belle caricature de ce que peut faire de plus moche l’humain. Avec La Gloïre (humain repoussant barbotant dans un ruisseau couleur sang et repêchant ce que les habitants y jettent avec sa bouche) que l’ensemble des habitants payent pour qu’il porte leur honte. Et donc ces habitants qui se permettent tout, puisqu’ils n’ont plus honte de rien : battre les faibles, torturer les animaux etc…
Enfin, Vian critique la religion et son hypocrisie, le personnage ridicule du curé qui prône la religion du luxe (« pluxe » = plus de luxe).

Le style de Vian inimitable composé notamment par une débauche de mots jusqu’alors inconnus : des trumaux (comprendre des triplets), psychoser, psychiatrer ainsi que des noms de mois remaniés : octembre, févruin, avroût etc.
Et comme je disais plus haut, une débauche d’éléments mi-réels mi-fantaisistes : un chat qui parle, des enfants qui volent grâce à des limaces bleues, Jacquemort qui devient à moitié chat…

Du Vian, quoi… à lire…