D'où ça vient? Je n'en sais diable rien.
Tout juste assez baroque cependant pour que les gens se posent des questions. De quoi rendre sa personnalité, au demeurant très peu intéressante - c'est aussi pour cela que l'on écrit, pour l'esbrouffe pure et simple -, Gunthar ou de quoi couler le personnage dans une chape de mystère. D'autres pseudonymes me tentent : Starsky, Eschare, Kropotkine, Serge Lama, Cravate le Faignant, Jean Cocteau, Général Alcazar, Le Singe en Pantalon, Korzeniowski, etc. (il y en a une tripotée d'autres, ceux - des superlatifs pour la plupart - dont on m'affuble dans l'intimité, certains sont carrément vulgaires - je préfère les taire - vulgaires mais flatteurs). Je pense au fond que Gunthar est un moindre mal, tant je suis capable de mauvais goût. J'ai toujours été comme Juliette, à me demander what's in a name? et je commence à me dire qu'il n'y a au fond pas grand-chose. Demander à Gunthar (c'est très drôle de parler de soi à la troisième personne, assez déroutant au début) ce que veut dire Gunthar, d'où ça vient, etc. c'est questionner un chauve sur le sens profond de la perruque qu'il porte pour aller en ville. Or, j'en suis convaincu, il est une métaphysique de la perruque. De même qu'il existe des moutons à cinq pattes. Gunthar porte en vérité une fausse perruque, faite de sa propre chevelure, littéralement greffée à son cuir chevelu, il lui arrive même de dormir avec. Quel étourdi. Il est du reste peu probable qu'il souffle un jour un vent assez fort pour lui arracher - oui, c'est le mot - cette maudite perruque, ou plutôt ce scalp, ou alors ce serait un vent terrible, un vent qui comme le flingue de l'inspecteur Harry vous arrache la tête aussi facilement que le vent fait s'envoler un chapeau de votre tête justement. Mais s'il soufflait un tel vent, le problème de la perruque n'en serait plus un - l'a-t-il jamais été? - puisque la tête même se détacherait, la postiche, on l'aura compris, bien rivée à la fois aux parties occipitale, pariétale et frontale du crâne, de ladite tête, aussi nommée tronche, caboche, melon ou coloquinte (concombre fort amer (cucumis colocynthis, L.) Amer comme coloquinte. Les bignonias, les coloquintes s'entrelacent au pied de ces arbres de toutes les formes, CHATEAUB. Atala, 204. Coloquinte fausse, variété de courge qui n'a aucune amertume. Dans un langage très trivial, la tête, ainsi dite par assimilation de forme. Un coup de poing sur la coloquinte, nous dit Littré), la moumoute, elle, s'agripperait de toutes ses forces, et ne bougerait pas d'un poil. A moins que bien entendu sous l'effet de la bourrasque, que dis-je de la tempête, du cyclone, tout le corps ne se renverse plaf ou s'envole, mais n'exagérons pas, n'exagérons pas. Gunthar du reste reste bien à l'abri des vents, bien que le placard à balais où il a élu domicile, endroit exécrablement crade et confiné, ne le protège pas des siens, bien au contraire, puiqu'il contribue à l'étouffer et qu'il y vit avec les siens, je veux dire, avec sa smalah, ses quatre grands-parents, ses sept oncles, ses trois tantes, étouffants eux aussi - famille je vous hais - sans oublier Cyril son poisson rouge rendu amphibie par la force des choses, sans oublier ses furoncles au milieu du dos, au cul et dessous les bras, inflammations qui le font drôlement souffrir, un peu de compassion pour ce pauvre Gunthar je vous en prie, mettez une petite pièce dans le galurin merci, c'est, je ne vous le cache pas, pour me payer sur son dos une petite bouteille de pelure d'oignon ou de n'importe quel autre rouquin qui saoule vite et bien, à votre bon coeur. J'espère avoir répondu à ta question.